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Au pays du Chasselas

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Les 5 du Vin
En marge du Mondial du Chasselas, qui se tenait le week-end dernier dans la jolie bourgade d’Aigle, j’ai eu la chance de pouvoir déguster quelques très beaux vins issus de ce cépage emblématique de la Romandie (dont ce sera bientôt la fête, le 25 juin, toujours à Aigle).

2015 a été une très bonne année pour ce cépage, partout en Suisse; les bonnes notes attribuées par mon jury lors du concours en attestent; c’est donc le moment idéal pour le découvrir, si ce n’est déjà fait.
En avant-goût, voici trois vins qui, à mon sens, illustrent bien la richesse, et du Chasselas, et des vins vaudois.

 

Calamin Domaine de la Chenalettaz 2015 Réserve du Margis

Calamin est un des deux grands crus du Lavaux (avec Dézaley), entre Lausanne et Montreux.  C’est le plus petit des deux (18 ha). Il doit son originalité à ses molasses argileuses et à ses fortes pentes (le vignoble monte à l’assaut du coteau, depuis les rives du Léman jusqu’à 300 m d’altitude).

Le Domaine de la Chenalettaz est la propriété de la famille Chevalley, qui produit toute la gamme de beaux crus de Lavaux (Calamin Grand Cru, Dézaley Grand Cru, mais aussi Saint Saphorin et Epesses).

Ce vin m’a séduit par sa richesse en nez et en bouche; il présente des notes de prune et de tilleul, un beau gras et une superbe amertume (non, ce n’est pas péjoratif: c’est la marque d’un vin complet, et qui ne finit pas mou). Oui, on peut être sec et gourmand.
Le Calamin présente généralement un beau potentiel de vieillissement, et celui-ci ne fait pas exception à la règle. Mais il est déjà tellement bon qu’il faudra avoir une sacrée force de caractère pour résister à la tentation de l’ouvrir dès maintenant!
Du même grand Cru Calamin, j’ai également beaucoup apprécié le 2015 de Claude et Alexandre Duboux, à Epesses.

 

Dézaley-Marsens de La Tour 2015 Domaine des Frères Dubois

Les Frères Dubois sont installés au lieu-dit du Petit Versailles, à Cully, depuis trois générations. Ils produisent une belle gamme de Chasselas de Lavaux, du Grand Cru Dézaley-Martens (Cuvée de La Tour) au Grand Cru Calamin (Cuvée Le Petit Versailles), en passant par Epesses (La Braise d’Enfer), Saint Saphorin, Puidoux ou Villette…

Ce Dézaley-Marsens est un chasselas puissant et bien mûr, avec de superbes notes de mirabelle au nez; dans la bouche, relativement vive, c’est plutôt le floral qui domine (chèvrefeuille, jasmin); à ces arômes délicats se superpose de la réglisse, et en finale, une belle pointe saline (pour ne pas dire minérale). Ce vin est encore très jeune, il ne devrait être embouteillé qu’en septembre prochain. En attendant, les Dubois proposent toute une gamme de millésimes plus anciens; le 2014, issu d’une année un peu moins généreuse, est cependant étonnamment mûr; en Dézaley (comme en Calamin), on dit que le vin voit trois soleils: celui du ciel, son reflet dans le lac, et celui qu’emmagasinent les innombrables murettes qui soutiennent les terrasses du Lavaux. De plus, les Dubois récoltent toujours le plus tard possible, pour profiter au maximum de l’été indien, parfois, vaudois…

A noter que ce cru présente d’excellents aptitude à la garde: le 1995, dégusté un peu plus tard, est de toute beauté; ce qu’il a perdu en aromatique, il semble encore avoir gagné en matière.

 

Château Maison Blanche Yvorne Grand Cru 2014

Nous voici à Yvorne, en Chablais; ici, plus de lac pour refléter le soleil, mais un effet de foehn comparable à celui qu’on constate en Valais. C’est là que depuis 1673, se dresse la Maison Blanche, avec sa tour au toit pointu.

Autour de l’édifice, 7,5 ha de vignes de forte pente, aménagées en terrasses, composent une marqueterie de sols, du plus caillouteux aux alluvions les plus riches; c’est la conséquence d’un éboulement intervenu en 1584, qui a mélangé les calcaires du vieux socle du trias aux sols plus récents, décomposition des roches alpines.

Même les plus sceptiques en termes d’effet-terroir devront admettre que ce vin présente une grande complexité.

Ayant eu la chance de déguster ce même 2014 à deux reprises, en juin 2015 et en juin 2016, j’ai pu constater que cette année lui a permis de mieux se fondre; le  citron s’est un peu confit, de jolies notes de miel sont apparues, le côté fermentaire a disparu, par contre, pour laisser toute la place à ses notes iodées; ce qui est remarquable, dans dans vin, c’est sa structure, son amplitude; une texture presque tannique, un côté solide – qui a dit que le Chasselas était aussi neutre que la Confédération helvétique, qu’il produisait des vins fluets et inodores? Ok, c’est moi, dans une autre vie… Comme quoi l’on peut évoluer.

Depuis les années 1930, Maison Blanche est dans le giron de la famille Schenk. De quoi nous faire espérer en voir les vins un jour dignement représentés hors de Suisse.

 

Car voilà bien des produits dignes de figurer sur les plus belles tables de la gastronomie; si j’étais un homme d’affaires suisse venu signer un contrat en Belgique, et que j’invitais mon client à déjeuner dans un bel établissement, je serais fier de lui proposer ce bel ambassadeur du savoir-faire de mon pays…

Et qu’on ne me dise pas que c’est trop cher quand c’est le prix de l’émotion.

 

A propos des 5 du vin

Ce blog suivi à ce jour par près de 16'000 lecteurs est né de l’heureux hasard d’une rencontre, en février 2010, au Salon des Vins de Loire d’Angers, autour d’un verre de rosé de Bourgueil – celui de Pierre Jacques Druet. Il y avait là cinq plumitifs du vin. Le rosé aidant, l’idée a germé de créer un espace commun.

Parce qu’à cinq, on peut aborder plus de thèmes. Parce qu’on peut débattre. Parce qu’on peut partager. Des coups de coeur, des coups de gueule, de l’expérience. Et qu’est-ce que le vin sinon une boisson de partage?

De ces cinq, certains étaient déjà des blogueurs confirmés, d’autres non. Comme il y a les 5 sens, il y  a maintenant les 5 du Vin.

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