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Le vin suisse prend de la bouteille

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Texte: Charly Veuthey
Viniculture Alexandre Truffer est rédacteur en chef adjoint de «Vinum» et membre du jury du Grand Prix du vin suisse. Il nous parle de la qualité et des tendances des vins suisses.

Le 21 octobre, Berne accueille le gala du Grand Prix du vin suisse. Quelle est l’importance de ce prix?
Avec 3000 vins présentés au jury, c’est la plus grande vitrine des vins suisses. Et très clairement le concours national qui présente le plus de vins proportionnellement aux hectares de vigne. C’est aussi la preuve que les producteurs suisses ne se disent pas qu’ils ont tout compris: ils veulent se comparer aux autres. C’est une des forces de la viticulture suisse. Les vignerons cherchent toujours à progresser.

Où en sommes-nous dans cette progression?
Nous vivons la période bénie du vin suisse. Il n’a jamais été aussi bon et diversifié. La qualité moyenne a largement augmenté. Depuis les années 1990, des améliorations ont été apportées dans tous les secteurs de la production, de la vigne à la vinification. 

Quelle est aujourd’hui la force des vins suisses?
Nous avons une diversité formidable et chaque cépage a ses spécialistes capables de produire des vins de très haut niveau. On fait du bon vin partout dans le pays, avec des forces spécifiques dans chaque région. Les vignerons de qualité se trouvent aussi bien chez les petits que chez les grands producteurs. 

Tous les vignerons ont-ils progressé de la même manière?
Évidemment non. Il y a quinze ans, dans un village, le niveau des vins était très proche. Aujourd’hui, on tend vers une viticulture à deux vitesses. Entre un vigneron exceptionnel et son voisin, il peut y avoir un fossé. D’un côté, on a des producteurs qui excellent et peuvent se mesurer aux meilleurs sur le plan international et, de l’autre, des gens qui n’ont pas pris les bons tournants. Mais, de manière générale, en Suisse, les bons vignerons sont proportionnellement plus nombreux que dans des régions beaucoup plus réputées comme le Bordelais ou la Bourgogne.

Où se situent les vins suisses dans les concours internationaux?
Il y a 25 ans, ils n’obtenaient quasi pas de médailles. Aujourd’hui, dans tous les grands concours, par exemple le Concours mondial de Bruxelles ou les Vinalies internationales de Paris, la Suisse fait toujours très bonne figure et se classe souvent dans les premières nations en nombre de médailles.  

Et sur le marché international?
Ça ne vaut pas la peine d’en parler. La part d’exportation des vins suisses est inférieure à 1%. L’exportation a son importance pour améliorer l’image des vins suisses, mais n’est pas significative d’un point de vue commercial.  

À vos yeux quels sont les trends dans les vins suisses de qualité?
Nous avons, depuis deux ou trois ans, une forte réussite avec les blancs aromatiques: petite arvine, en Valais, traminer dans la région du Vully, sauvignon blanc. Le chasselas connaît aussi un retour en grâce. Dans les rouges, les assemblages haut de gamme sont en grande progression. Le gamay est de mieux en mieux travaillé et revient en force, en montant en gamme. Les effervescents progressent aussi beaucoup: on en trouve de plus en plus qui peuvent sans autre rivaliser avec les champagnes de la grande distribution.  

Des affaires ont émaillé le vignoble romand ces derniers mois. Qu’en pensez-vous?
Il faut être nuancé. Ces affaires touchent un pourcentage infime du vin suisse (quelques dizaines de milliers de litres). D’autre part, nous consommons 300 millions de litres de vins par année en Suisse, dont 100 millions de vins suisses et il n’y a aucune affaire concernant les vins étrangers. C’est pour le moins étonnant!