Des viticulteurs proposent le premier Salon bio de Lavaux
- Mercredi 22 février 2017
Image: Ils ne sont que six vignerons sur 200 à Lavaux. Las, c’est assez pour une manifestation! Ainsi, Pierre Fonjallaz, Gilles Wannaz, Blaise Duboux, Gérald Vallélian, Jean-Christophe Piccard et Pierre-André Jaunin, tous labellisés Bio Suisse ou Demeter (biodynamie), proposent, le samedi 1er avril, le premier Salon de la viticulture bio de Lavaux.
Les six producteurs labellisés de la région se mettent ensemble pour promouvoir leur vin respectueux du terroir.
Ils ne sont que six vignerons sur 200 à Lavaux. Las, c’est assez pour une manifestation! Ainsi, Pierre Fonjallaz, Gilles Wannaz, Blaise Duboux, Gérald Vallélian, Jean-Christophe Piccard et Pierre-André Jaunin, tous labellisés Bio Suisse ou Demeter (biodynamie), proposent, le samedi 1er avril, le premier Salon de la viticulture bio de Lavaux.
Six, une paille? «C’est une explosion! lâche Gilles Wannaz, premier labellisé bio de Lavaux (2003), qui accueille la manifestation à la Tour de Chenaux. On passe d’un il y a trois ans à six presque d’un coup!» Le pionnier, qui a fait le pas de la labellisation alors que le mouvement «biodynamique» avait à peine débuté en Suisse romande, parie d’ailleurs sur une évolution rapide. «On part de zéro, mais notre objectif est d’arriver à 50%.»
Pas de prosélytisme
Pierre Fonjallaz, initiateur du rassemblement, partage cet avis. «Les jeunes vignerons se posent des questions, et ils sont prêts à changer.» Ce n’est pourtant pas à un salon prosélyte qu’il invite. Le vigneron, également candidat Vert au Grand Conseil, insiste: il ne veut pas convaincre et respecte ceux qui ne font pas le pas du bio, que ce soit pour des raisons idéologiques ou économiques.
«L’idée n’est pas de dire «on est bio donc c’est mieux», mais d’inviter les gens à venir goûter nos vins, et à observer qu’ils ne sont pas aussi différents qu’ils le pensent», explique Blaise Duboux. Pour contredire la mauvaise réputation que les vins bio traînent derrière eux, les spécialistes s’accordent même pour dire que ce mode de culture est idéal pour mettre en valeur les terroirs. De grands domaines bordelais ou bourguignons l’ont bien compris sans l’afficher.
La différence, c’est au niveau de la production qu’elle se fait. En 2016, forte année de mildiou (champignon), Blaise Duboux a vu son chasselas donner 625 gr au lieu de 1,250 kg autorisé par les quotas au mètre carré. De son côté, Pierre Fonjallaz gagne moitié moins qu’il y a huit ans. Et Gilles Wannaz a diversifié son offre (avec une épicerie et un service traiteur) pour s’en sortir. «Les quotas ont fait que le maximum légal est devenu le minimum vital, déplore-t-il. On est bien loin de l’équilibre…»
Malgré les difficultés économiques – dues à une vulnérabilité plus grande de la vigne aux maladies – les trois vignerons ne reviendraient en arrière pour rien au monde. «Le bio, c’est une transformation dans ma vie!» insiste Pierre Fonjallaz. Le mode de culture «encourage à être ensemble» et rendrait carrément le vigneron plus «joyeux». «Tu retrouves le sens du travail, la joie de faire et un souffle de liberté», décrit Gilles Wannaz. Son compère évoque «le retour du foin dans les vignes, des sauterelles que mon père n’avait jamais vues et des fraises des bois».
Ceux qui passaient pour illuminés il y a quelques années prônent aujourd’hui sans fard un respect intelligent de la nature, dans une région longtemps considérée comme un bastion des traditionalismes. «On reste des originaux, mais il y a de la bienveillance par rapport à notre discours», conclut Pierre Fonjallaz.
A retenir: 1er Salon de la viticulture bio de Lavaux, sa 1er avril, de 11 h à 18 h, chez Gilles Wannaz à la Tour de Chenaux.
L’Etat favorise le passage au bio
L’Etat investit dans le bio depuis plusieurs années proportionnellement au pourcentage de producteurs. En 2016, moins de 4,3% (163 ha) de la surface viticole vaudoise était en production biologique. Malgré ce chiffre encore faible, une formation initiale et continue, et un soutien technique sont proposés depuis 2009. Une subvention à l’hectare est allouée pendant les deux ans de reconversion depuis 2011.
Et dès la rentrée 2017, un CFC avec orientation viticulture biologique existera à Marcelin pour répondre à un récent engouement. «L’absence de reconnaissance cantonale jusqu’en 2011 a freiné certaines reconversions, analyse Frédéric Brand, chef du Service de l’agriculture et de la viticulture (SAVI) du canton de Vaud. Mais il y a aussi la pression sociale des pairs, les préjugés et le surplus de travail pour un rendement moindre.»
En revanche, depuis qu’en France la sécurité sociale a reconnu certaines maladies comme liées à l’utilisation
des produits phytosanitaires, des producteurs considèrent
les risques pour leur santé.
La pression de la grande distribution qui exige le «zéro résidus» et une offre toujours plus grande de produits bio encourage aussi des reconversions. Et la pression des consommateurs? «Elle n’est pas encore vraiment très forte pour le vin», répond Frédéric Brand. Même si les professionnels constatent un mouvement de méfiance envers l’utilisation de produits chimiques et un impact positif du bio – le sulfatage sans produits de synthèse mis en place à Lavaux y est lié –, ils relèvent en effet que, pour leur clientèle, le bio n’est pas vraiment un argument.